Respecter une justice respectable
La récente décision du tribunal correctionnel de Paris à l’endroit de Marine Le Pen a suscité de nombreuses réactions. Les attendus et la sanction – notamment la peine d’inéligibilité avec exécution immédiate – ont été reçus par les soutiens de Madame Le Pen comme une intrusion de la justice dans le combat politique, comme la volonté d’éliminer celle qui est désignée par les sondages comme la favorite pour le prochain scrutin présidentiel. Les juges, présumés de gauche, ou à tout le moins fervents opposants au RN, auraient ainsi voulu éliminer la candidate de la droite nationale.
La critique d’une décision de justice par un responsable politique ne pose aucun problème de principe. Les juges peuvent se tromper et les recours existent pour corriger ce qui doit l’être. Dans le cas d’espèce, le recours n’est pas suspensif s’agissant de la peine d’inéligibilité de 5 ans. Mais les juges n’ont fait qu’appliquer une disposition du droit, ce droit voté par l’Assemblée nationale, ce droit, émanation de la volonté du peuple. En critiquant la décision des juges, les parlementaires se critiquent eux-mêmes !
Au-delà de la critique d’un jugement de première instance, il va de soi qu’il n’est pas acceptable de critiquer les juges qui l’ont émis. Il en va de la santé même de notre démocratie. Elle a besoin d’une justice indépendante dont les décisions sont exécutées. L’état de droit en dépend, nos libertés publiques sont garanties par une justice indépendante que nul ne peut contester. A ce titre, il faut défendre sans nuance la justice et ceux qui la rendent.
Le sujet devient plus difficile quand ceux qui rendent la justice au nom du peuple français, ceux qui vêtus d’une robe noire disent solennellement le droit, se comportent de façon incompatible avec la grandeur de la mission qui leur est confiée. Plus encore que les responsables politiques, les juges doivent demeurer au-delà de tout soupçon de parti pris et adopter pour ce faire une attitude personnelle et collective marquée par la retenue, la discrétion, la neutralité politique.
Et il faut bien le constater, les juges ne sont pas toujours respectueux de leur propre fonction. Certains, une minorité, n’hésitent pas à entrer dans le champ politique avec des attitudes proches de l’outrance, celle qu’on retrouve parfois à l’extrême gauche. Le syndicat de la magistrature qui appelle à faire barrage à la candidate de la droite nationale, qui réagit à la nomination d’un garde des sceaux par le slogan « c’est une déclaration de guerre », les juges qui érigent dans leur local syndical un « mur des cons » avec les portraits de personnalités civiles et politiques – de droite – qui leur demandent simplement des comptes … Tout ceci abîme l’autorité judiciaire et sape les fondements mêmes de notre démocratie.
Les syndicats de policiers sont classés à droite, soutenus par les partis de droite.
Les syndicats de magistrats sont classés à gauche, soutenus par la gauche extrême.
Tout ceci est inquiétant pour notre pays et notre démocratie. Les syndicats des professionnels de la police et de la justice, de toutes les professions du domaine régalien, faute d’adopter des attitudes responsables et dignes, devront à l’avenir voir leur domaine d’intervention limité par la loi. Ainsi il devrait être impossible à un juge d’émettre un avis sur une élection à venir. Oui il faudra limiter les possibilités d’intervention dans le débat public des policiers et plus encore des juges.